Epic Enduro 2018 – Le compte-rendu “gagnant” de Florian Golay

Pionnier de la discipline Enduro VTT, double vainqueur des deux premières éditions classiques, complétées par une première place à égalité en VTTAE en 2016, le Suisse Florian Golay nous conte ses aventures à l’occasion du Radon Epic Enduro, la plus longue et la plus difficile des courses Enduro VTT…

 


Temps de lecture estimé : 12 minutes – Photos : Endurotribe/VTTAE.fr


 

 

Epic 2018 ?!

L’Epic fait partie à mes yeux, des événements quasi inévitables d’une saison qui démarre. Pour ma part, j’ai toujours fait le choix d’y participer avant même que l’hiver ne débute. Question de bien ingérer le gros morceau que représente ce jour sans fin.

Cette version 2018 pose son lot de points d’interrogation devenus habituels après 4 participations : la forme générale ? La “vitesse” du moment ? Les choix matériels les plus rusés afin de vaincre le «”monstre” ?, etc. Et évidemment la question que chacun se pose, pilote d’un VAE ou avec double raison d’un modèle traditionnel : vais-je tenir la journée jusqu’au bout ?!

Ajouté à cela une météo s’annonçant cataclysmique et vous avez là une jolie pelote de doutes à démêler !

Personnellement, je n’ai jamais vraiment eu la sensation durant cet hiver sans fin de rassembler les bons éléments qui font que l’on se pointe sereinement au départ d’un défi de cette taille. Un manque certain d’entraînement de fond, des refroidissements longs et répétés, peu de roulage à cause de la neige tombée en abondance par chez moi et encore moins d’intensités effectuées, ceci afin d’épargner mes pauvres bronches endommagées et désormais quadragénaires.

Malgré cela, 3 points que je qualifie de “positifs” me permettent de conserver ce zeste de confiance syndicale qui vous remet en selle lorsque c’est nécessaire. Les voici :

1/ Ce sera ma cinquième Epic en 2018 et les 4 premières ont eu des issues plutôt réconfortantes.

2/ Je ne vais pas commencer à faire ma pleureuse alors que je fais ça depuis plus de 20 ans, et maintenant, de surcroît au guidon d’un VAE… ce serait le comble !

3/ J’ai un tel entraînement dans le manque de sommeil grâce à mes petites Chéries de la Team des sœurs Golay (11 et 28 mois) que le départ peut bien être donné à 2h du mat’ s’il le faut !

Armé de ces certitudes, je n’ai plus qu’à me préoccuper d’une chose essentiel : le matos.

Le vélo est le même qu’en 2017, un Lapierre Overvolt Carbon en taille M, toujours en moteur Bosch. C’est un combo qui a fait ses preuves. Cotés pneus, j’ai logiquement décidé de mettre l’accent sur un choix hyper fiable (double crevaison en 2017). A l’arrière, les 1400g du Magic Mary 2.6 DH me permettront de faire face à quelques imprécisions si la fatigue se fait insistante au fil des spéciales. A l’avant ce sera aussi un Magic Mary 2.6 mais en carcasse Apex, c’est un bon compromis précision/effort. Dans le cas extrême où les 10 mm/heure annoncées dans la prophétie locale devenaient réalité, le Dirty Dan 2.35 serait ma bouée de sauvetage. Finalement, côté suspensions, j’ai opté pour une Lyrik 2018 en 170mm ainsi qu’un amortisseur Super Deluxe dont je me suis occupé tout personnellement.

Le choix des roues est un panaché de confort et de durabilité avec à l’avant une Stan’s Bravo Carbon et sur l’arrière une DT swiss 481 en 30mm interne. Voilà pour clore le chapitre matos.

L’Epic, c’est aussi une histoire d’Amitié, certain qu’il existe un adage disant qu’il vaut mieux souffrir bien accompagné plutôt que seul. Et comme le dit si bien Olivier “Giordy” Giordanengo, “l’ascenseur émotionnel” fait partie prenante de cette épreuve. Bref, ne partez pas seul où vous vous ferez croquer tout crus !

Mais nous n’en sommes par encore là, il faut d’abord atteindre Olargues. Nous prenons la route ce vendredi 6 avril, avec, au volant François Bailly Maitre, mon pote et ex team mate aux racines jurassiennes et Virgile, autre Ami de longue date, il n’en est pas à sa première Epic, mais il vivra pour cette édition son baptême du “jouet” électrique. Etant donné qu’il roule sur mon Lapierre de 2017, j’assume quelque peu la double pression côté matériel tout en restant confiant.

Confiants, nous le sommes moins côté ciel. Pas 10 minutes se passent sans que nous scrutions “machinalement” les différents profils météorologiques, trajet faisant.

Une fois sur place, nous rejoignons la sympathique équipe tout droit venue du 06, composée de Giordy, Kenny Muller, Nadine Sapin et notre précieux mécano Jérôme. Les recos s’organisent afin de goûter aux nouvelles spéciales de ce millésime. L’apéro roulage se fera sur le combo SP6 et 7, morceaux de choix d’après les rumeurs. Nous rentrons à la tombée de la nuit, effectivement secoués comme une boule de flipper à la sortie d’une soirée “vintage”.

 

Le Jour d’avant

J’aime bien faire une bonne journée roulage la veille d’une Epic, sans trop forcer mais quand même en se mettant dans le rythme long et à la fois intense que demande cet “Ultra” de l’Enduro. Au programme donc SP8, 9, 10, 2 et, avec en bonus, le haut de la “Une”, car c’est important de savoir comment démarrer la journée de course, le grip, l’engagement à mettre, le conditionnement, surtout lorsqu’elle débute en nocturne. Nous terminons la journée sur une note réconfortante, le terrain est magnifique et le suspense en interne se fait déjà sentir. Kenny a encore progressé, techniquement parlant, il est propre et confiant. Ce sera l’homme à “abattre” si je puis dire. Il a la fougue de la jeunesse et nous pousse au c** à chaque rendez-vous, réelle source de motivation pour nous les quadras ! Giordy, quant à lui, semble avoir une belle “vitesse” spécialement dans le cassant où il semble faire rouler son Overvolt sur un tapis de velours. Je crains ses chronos dans la boucle 2, on en cause un peu et on en rigole surtout. Virgile affiche une généreuse banane et aucun bobo ce qui est plutôt de bonne augure pour le lendemain.

 

La grève du déluge

La bonne surprise, la vraie, tombe en rentrant au logement où Nadine nous apprend que la mousson promise sera décalée d’au moins 7 voire 8 heures ! Je respire un grand coup, vraiment soulagé, commençant même à me réjouir d’en découdre dans les heures qui viennent. Reste “plus qu’à” monter les phares…

 

 

Acte 1, Roulette Rousse

Dimanche 3h30, le réveil s’est fait sans trop de peine pour une fois, quelques regards et commentaires de circonstances sont échangés, les affaires rassemblées dans le bus, l’atmosphère est détendue mais la sensation d’aller au charbon malgré tout perceptible… sauf que le “charbon” en question s’avère d’excellente qualité dans la région ! Le petit stress du départ avalé, l’ascension vers la SP1 effectuée, je suis au départ de l’Epic 2018, le mode Turbo est enclenché – OK, les Turbo jambes sur ON – OK, le starter me donne le sien et c’est parti !

Les 3 premières spéciales ont été un petit régal, truffées d’appuis travaillés et de jolies lignes à trouver. J’avais eu un petit faible pour la SP2 de Mezeilles lors des recos et j’en suis tombé amoureux lors du chrono ! Roulée dans la nuit noire, son tracé, la vitesse et le rythme qu’elle impose sont un vrai délice ! Sur la courte liaison menant à la SP4, ultime spéciale de la boucle 1, nous débriefons du début de matinée passé, encore euphorique des quelques freinages tardifs et chicanes passées sur le fil. Arrivé au départ, je m’élance sur “bas de la mienne” avec une bonne confiance et la sérieuse envie d’un petit Arabica… sauf qu’à peine 1 minute de course passées que mes manivelles se bloquent, je n’ai plus de transmission ! J’essaie de rester zen, il n’y a pas de gros pédalage sur cette spéciale, donc il faut minimiser les freinages et se faire tout doux. Je passe la ligne sans avoir trop perdu, heureux que cette mésaventure arrive à cet instant, si près du paddock. Je le rejoins en trottinette, roulette de dérailleur arrachée. La bonne surprise vient du ticket de chrono qui me donne Leader avec 20 secondes d’avance sur Giordy et 1 minute sur Kenny. Les 6 minutes 51 secondes de la SP2 me confirment la sensation d’efficacité ressentie.

 

 

Acte 2 ,Torture Ninja

Cela fait déjà bien 1h30 que nous avons quitté le paddock, en ayant pris garde de s’être alimenté et hydraté avec attention. La fameuse SP5 de Bardou s’est faite sur un terrain légèrement humide, imposant le respect à quiconque voudrait tâter du caillou millénaire. Kenny a quasiment rattrapé Olivier et semble être en mode “on fire” en franchissant la cellule d’arrivée. Personnellement j’ai bien sauvé les meubles en soignant particulièrement le bas de la spéciale, magnifique et défoncé. Je garde toujours en souvenir cette caméra embarquée de Théo Galy se jouant de Bardou avec une efficacité déconcertante (à regarder ici à partir de 11:40). A voir absolument, pour l’inspiration et la beauté du geste “local”. Mais à ce moment là nous sommes encore bien loin de la SP6 et la fatigue nous croque peu à peu les mollets. Contraint de rester sur le mode Eco, le vélo semble peser et le coup de pédale s’en ressent. Je constate que Giordy “pioche” anormalement et cela ne me plait guère. Virgile quant à lui tient apparemment bien le coup, il a souffert de la violence de Bardou sans pour autant démontrer trop de séquelles. Entre temps le ciel est devenu suffisamment sombre pour nous forcer à revêtir nos vestes pluies. Passe le court chrono n°6, parenthèse fraîche et intense qui entrecoupe cette interminable liaison menant au Mordor de l’Enduro, “les Fleisses”.Une sorte de châtiment ultime pour tous bikers appréciant le flow et les “loamy trails”.

11 minutes de marteau piqueur entrecoupées de virages à plats infranchissables. Ici le mou et la tendresse n’existent pas, le plaisir est enfoui si profondément que seul le vainqueur de ladite spéciale en recevra une gouttelette. Pour les autres ce sera humiliation à spectre large. Bienvenue à “Torture Land” et tâchez de rallier l’arrivée en une seule pièce ! Plaisanteries mises à part, ce fut une spéciale hors norme et à ce jeu Giordy nous a démontré que personne n’allait lui apprendre à faire la grimace. Pas vraiment une surprise mais chapeau tout de même !

Cependant la satisfaction est de courte durée car sur le chemin du retour, Olivier n’a pas la tête des grands jours et remet sérieusement en question la boucle 3. Je pense d’abord à une baisse de moral passagère que tous les participants de l’Epic connaissent (le fameux ascenseur émotionnel). Mais pas cette fois, après avoir rejoint le paddock, isolé sous la tente du Team, mon coéquipier et Ami décide de rendre sa plaque, ceci malgré le fait qu’il ait remporté la boucle 2. Trop de fatigue, trop de prise de risque alors que la saison débute à peine. Je respecte totalement mais j’avoue que notre quatuor de “Dalton” a tout à coup moins fière allure. Fin de l’acte 2 sur une note quelque peu amère.

 

 

Acte 3, Pousses et sa Mousse

J’aime et je déteste à la fois repartir dans la boucle 3. D’un coté il y a un “boulot” à terminer et c’est plutôt excitant mais de l’autre, l’ennui n’est pas si loin et avouons le : c’est moche de risquer de s’ennuyer sur de pareils tracés ! Donc on puise ou l’on peut et c’est à ce moment que l’entourage est précieux. Surtout que la pluie renchérit avec générosité. Notre quatuor devenu trio tente de garder le moral en gravissant le chemin vers le chrono n°8. Et heureusement ! Car les spéciales proposées sur cette ultime boucle sont de réelles pépites ! Tout d’abord “Mini Jurassic” et son concentré de racines au savon, suivi du “Pin” sentier virevoltant dans un toboggan de pierres et dalles déversantes. La proximité des arbres amplifiant les sensations quasi “supersoniques” de ce tracé, une merveille ! L’avant dernière et inédite “Bouscassou” se montre totalement dépaysante. Il y a de la bonne terre souple et des arbres intimement proches, le vélo redevient silencieux l’espace d’un chrono, mais quel chrono !

Arrive ensuite ce moment si particulier de LA dernière spéciale. Celle que vous redoutiez pouvoir atteindre et qui finalement se pointe. Vous touchez le but mais il faut conclure. A ce moment, je savoure l’instant car j’aime terminer l’Epic par “Collombières”. Elle représente tout ce que j’aime faire sur un VTT. Un condensé de 10 minutes regroupant une multitude de terrains et de difficultés de toutes sortes. On s’élance en compagnie de Kenny et je me régale ! Le terrain est savonneux et je réalise très vite qu’il faut calmer mes ardeurs si je désire passer la ligne en un morceau. Le vélo marche du tonnerre et c’est tentant de pousser encore un peu… 10:50 secondes plus tard c’est la délivrance ! Le matériel a tenu et selon mes calculs la victoire sera au bout du chemin vers Olargues. J’attends quelques secondes Kenny afin de le féliciter puis Virgile qui suit et conclut de la plus belle façon son 1er Epic en VTTAE.

Sur le chemin du retour, on savoure le moment mais on a forcément une pensée pour notre pote Giordy qui manque au tableau. Nous le rejoignons au paddock au moment de rendre les puces et de valider les chronos. Les bracelets sont rendus, les tickets imprimés et le bon pressentiment se confirme. Je remporte cet “E-pic 2018” devant Kenny Muller, 3ème David Rimailho puis l’étonnant Virgile qui a vraiment démontré une jolie constance pour cette 1ère expérience VTTAE. Bravo à Lui !

Je souhaite vraiment remercier Vélo Carroux pour l’effort ÉNORME qu’ils investissent sur ces sentiers magnifiques afin de promouvoir leur région ! Evidemment, un Grand Merci aussi à Lapierre et à Jérôme pour l’excellent soutien mécanique et matériel mis à disposition tout au long du week-end.

Le mot de la fin : Que ce soit pour 1, 2 ou 3 boucles, laissez vous tenter en 2019 ! Il y a tellement de bonnes raisons d’y goûter ! Avec ou sans moteur que l’on soit clair 😉

Florian

Rédacteur en Chef
  1. J’ai toujours eu l’impression que vous (les élites) êtes des extraterrestres, des machines à gagner et que mise à part le problème mécanique ou de santé rien ne vous arrêtes.
    Mais à la lecture de ton témoignage, je me rends compte que c’est avant tout du partage entre potes avec quelques chronos étalés sur la journée.

    Le bonheur ne se vit que partagé..

    Beau témoignage Flo 👍🏾

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